adelphiagenevensis

ADELPHIAGENEVENSIS

Vivat, crescat et floreat Adelphia ad aeternam !

Qui sommes-nous ?

Adelphia Genevensis, c'est quoi ?

Adelphia Genevensis est l’unique société regroupant à la fois des étudiants et des étudiantes, du collège de Genève et de l’Université. Elle se distingue notamment des autres sociétés « portant couleurs » par son esprit latin et son goût des arts et des lettres.

Sa vocation est littéraire, et elle se départit des nombreuses sociétés dites « germaniques » en proscrivant tout usage venu d’Allemagne (jeux de bière, duels, bizutages, hiérarchie).

Fondée en décembre 1878, lors de la fête de l’Escalade, Adelphia est l’une des plus anciennes sociétés de Genève et compte plusieurs personnalités artistiques et intellectuelles. Ainsi, Philippe Monnier, Charles Bally, Henri Christiné, pour ne citer qu’eux, en ont été membres.

Elle se réunit environ 3 fois par mois le vendredi soir en son local, situé à proximité de Plainpalais, et organise également d’autres activités ponctuelles, telles qu’un vin chaud de l’escalade, un banquet bi-annuel, des sorties théâtrales ou autres fantaisies…

Adelphia est avant tout un groupe d’amis, partageant des valeurs communes et une certaine conscience civique. Son but est de favoriser et de resserrer des liens entre ses membres, qu’ils soient jeunes actifs ou plus anciens. La société des Vieux-Adelphiens regroupe près de 150 membres.

Adelphia ne fait aucune acception de personne ou d’opinions, et admet en son sein tout candidat qui par son esprit et lors d’une conférence d’admission en est jugé digne.

Adelphia est également enrichie d’une étonnante propension à s’adonner aux délices de l’existence. Ainsi, l’on s’amuse toujours ferme lors des « deuxièmes actes » des traditionnelles séances du vendredi…

Ses couleurs sont noir-rouge-noir.

Sa devise, empruntée à un passage de Salluste : « Concordia parva crescunt » (par la concorde croissent les petites choses).

Vivat, crescat et floreat Adelphia ad aeternam  !


Historique

Vains sont les mots pour définir Adelphia : il faut en être !

En 1878, les 1ères et 2èmes du Collège (correspondant depuis 1969 aux 4èmes et 3èmes) étaient rattachées à l’Université; c’est aux Bastions qu’elles avaient leurs cours, ainsi que le prouvent plusieurs dessins qui figurent dans nos archives. Trois sociétés d’étudiants ad­mettaient alors les élèves de 1ère et 2ème : c’étaient Belles-Lettres et Stella, d’abord, à la fois universitaires et gymnasiales, et Paedagogia, uniquement gymnasiale.

Comme nous le verrons, la naissance de l’Adelphia est due à deux faits : l’un, que les fondateurs désiraient être considérés comme étu­diants et en porter les insignes; l’autre, qu’aucune des sociétés exis­tantes qui leur étaient ouvertes ne leur convenait. Autour d’Edmond Gaillard, membre fondateur, se groupent ses amis : Antoine Perrot, Joseph Trottet, Edouard Burnet, Adrien Veyrassat. Plusieurs réunions ont lieu chez Landolt, et dans la chambre de Gaillard, en l’Ile. L’au­torisation est obtenue, les statuts et règlements sont fixés; un beau nom est adopté :

ADELPHIA, la fraternité.

La nouvelle société se distinguera par ses études littéraires et artistiques, en dehors de toute condition scolaire, et aussi par sa mo­dération dans la consommation de la bière; car à cette époque les beuveries estudiantines étaient fort en honneur. Les Adelphiens, en limitant à cinq chopes la consommation de la bière à chaque séance, faisaient figure, sinon d’abstinents, du moins de tempérants, et ils avaient à craindre quelque peu les railleries des autres sociétés. Les couleurs, après avoir été l’objet de grandes discussions, furent adop­tées : casquette noire au liseré rouge vif. La devise était empruntée à un vers d’Horace : Concordia parva crescunt.

La fondation a lieu officiellement le jour de l’Escalade 1878. Edmond Gaillard est le premier président.

Au cours des séances, travaux écrits et récitations sont critiqués sans pitié, souvent refusés, et défendus par leurs auteurs avec acharnement. Dans la seconde partie des séances, qui doivent se terminer à onze heures, on boit ses cinq chopes de bière. Mais comme on avait oublié de proscrire le vin, il semble que les Adelphiens se soient quelque peu rattrapés de ce côté-là. Dans leur local de la rue du Cheval-Blanc, ils font de l’escrime. Bien qu’ayant des Bürschen et des Fuchse, la société s’écarte déjà des coutumes germaniques : « Haïs de la thune germaine » écrit Philippe Monnier, devenu Adelphien en 1881, dans ce qui est devenu notre chant.

En 1881, justement, l’Adelphia donne une soirée en la salle des Amis de l’Instruction : on y joue Ruy Blas de Victor Hugo, et Philippe Monnier y tient le rôle de don César. Le succès est tel que le bénéfice permet de faire faire un nouveau drapeau pour remplacer la simple bannière mi-partie rouge et noire. Ce drapeau est celui qui est ce soir devant vous : il est de soie flammée rouge et noire, brodée d’argent, et c’est, sauf erreur, le plus grand de tous les drapeaux de sociétés d’étudiants. Il porte la date de la fondation, 1878, et celle de 1881.

Bientôt les Adelphiens connaissent un premier deuil et portent un crêpe à leur casquette : Edmond Gaillard, le fondateur, meurt, encore étudiant, âgé de 22 ans.

L’Adelphia croît et fleurit malgré tout. Les volées comptent 20 à 30 membres : Au printemps 1886, écrit L. Zbinden, un V.-A., nous étions une trentaine, et si je me rappelle bien, il fut un moment où nous fûmes 32. Malgré ce nombre relativement important, rien n’indique, dans toutes nos archives, qu’il se soit formé des coteries, qu’il y ait eu des jalousies ou des rivalités dans la société.

Quelle verve étincelante, quel entrain endiablé dans les joutes oratoires ! Que d’esprit dans la critique des travaux littéraires ! écrit l’un de ses amis Adelphiens, Constantin.

Aux « seconds actes », où l’on s’amuse ferme, on écrit des histoires en prose et surtout en vers, car chacun, ou presque, rimaille facile­ment en cette heureuse époque.

On ne saurait parler de l’Adelphia d’alors sans mentionner les fêtes de Cossonay. Adelphia s’est liée avec une société soeur de Neuchâtel, qui a nom Etude. Chaque année, en avril, les Adelphiens et les Etu­diens se rencontrent au bourg de Cossonay et y organisent une fête qui est annoncée oralement et par affiches. On joue la comédie, par­fois écrite par un Adelphien, on fait un cortège en grande tenue, une retraite aux flambeaux, un grand feu, un bal. Tout cela « révolutionne » quelque peu la petite ville et fait battre le coeur de mainte jeune fille, sans parler de celui des Adelphiens et des Etu­diens. Ces journées semblent avoir laissé à leurs participants un sou­venir inoubliable.

Eugène Lenoir, futur pasteur, et alors président de l’Adelphia, au­teur de plusieurs de nos chants, a une jeune soeur, adelphienne en­thousiaste : c’est la future Madame Marcel Guinand, qui, avec Me Marcel Guinand, jouera plus tard un rôle décisif dans la renaissance adelphienne.

Renaissance, car déjà les années difficiles approchent.

Car, en 1886, se prépare une nouvelle loi scolaire qui, entre autres dispositions, prévoit que les classes de 2ème et 1ère quitteront l’Uni­versité pour la rue Théodore-de-Bèze, et que les sociétés d’étudiants y seront interdites.

En 1888, la nouvelle loi scolaire entre en vigueur; la mort dans l’âme, la Société des Vieux-Adelphiens, qui s’est constituée depuis 8 ans, doit prononcer la dissolution de l’Adelphia pour obtempérer à un ordre de la direction.

On imagine l’amertume des Adelphiens, obligés d’abandonner leurs chères couleurs. Mais la Société des Vieux-Adelphiens subsiste; elle reçoit les derniers membres actifs, recueille les drapeaux, les écharpes, et conserve le matériel et les archives de l’Adelphia. Non seulement ses archives, mais son esprit; les anciens Adel­phiens se réunissent fréquemment en banquets, en soirées, organisent plus tard des excursions, même avec leurs familles. Entre temps, les autorités déclarent que les sociétés d’étudiants seront « tolérées » au Collège. Gymnasia se fonde, Paedagogia a repris son activité.

En dé­cembre 1900, naît pour les anciens un espoir de voir revivre l’Adel­phia : le Comité de Gymnasia écrit au président des Vieux-Adel­phiens que Gymnasia désire fusionner avec Adelphia.

Les V.-A. répondent positivement à cette proposition, mais à condition que le nom d’Adelphia, les couleurs et la devise soient con­servés, et que les membres honoraires de Gymnasia donnent leur ac­cord; les Vieux-Adelphiens et les Vieux-Gymnasiens devront fusion­ner.

Il semble que c’est à l’opposition des Vieux-Gymnasiens qu’est dû l’échec de cette négociation, qui eût abouti si la majorité des V.-A. eût cédé seulement sur les couleurs. L’heure n’est pas encore venue pour les couleurs rouge et noire de flotter de nouveau au Collège.

Ces anciens Adelphiens au souvenir tenace, à l’amitié solide, nous ne pouvons les nommer tous. Comme par hasard, ce sont ceux qui font la plus belle carrière qui sont les plus fidèles à la société, ainsi que les archives le prouvent.

Par la vertu de l’amitié et la force du souvenir, une sorte de miracle va se produire : l’Adelphia va ressusciter. Au Collège, depuis la classe de 4ème classique, s’est formé un groupe littéraire et artisti­que de 8 jeunes gens, groupe qui se dénomme le « Cénacle ». L’un de ses membres est André Guinand, fils de Me Marcel Guinand. Me Marcel Guinand a été élève du Gymnase quelques années après la dissolution de l’Adelphia, et il n’a pas pu, comme il l’aurait désiré, porter la casquette rouge et noire, car il a de nombreux amis parmi les anciens Adelphiens. Madame Marcel Guinand, soeur cadette de l’ancien président adelphien Eugène Lenoir, est toute adelphienne de coeur. Au début de juin 1919, M. et Mme Guinand suggèrent à leur fils André de proposer au Cénacle la reprise de l’Adelphia.

Le Cénacle, désirant que son esprit survive à sa volée, écrit, le 16 juin 1919, une lettre au Comité des Vieux-Adelphiens : cette lettre propose aux anciens de faire revivre l’Adelphia, en rendant les statuts conformes aux besoins de l’époque. Deux jours plus tard, le 18 juin, Me Marcel Guinand adresse une lettre au président des V.-A. qui ap­puie cette demande.

Le 1er juillet, nouvelle lettre du Cénacle pour soumettre aux V.-A. quelques modifications du règlement, lesquelles en conservent néan­moins l’esprit. Les points les plus remarquables sur lesquels les jeunes ont insisté sont :

– Le développement littéraire et artistique au moyen de conférences, travaux écrits, récitations, récitals de musique, etc.

– Proscription de tout usage venu d’Allemagne et de toute restric­tion à la liberté individuelle des membres.

Autrement dit, plus de « Burschen » et du « Fuchse », plus de « Komment », plus de « Fuchs-major ». Tous les membres de l’Adelphia seront égaux dès leur réception. Ils devront, pour être admis, présen­ter un travail de candidature. Le Fuchs-major sera remplacé par un « Thaliarche », nom repris d’un personnage cité par Horace et qui si­gnifie à peu près : « le directeur de la fête ». C’est lui qui sera chargé de diriger la partie récréative des séances (les « seconds actes ») en y ap­portant sa contribution personnelle.

[1] : Rappel : ce texte est lu en 1968.

Ainsi, c’est dans une lumière toute latine que renaît l’Adelphia qui, dans ses premières années déjà, avait marqué peu de propension pour les coutumes des étudiants allemands.

Plusieurs réunions ont lieu alors à Pinchat, chez Monsieur et Ma­dame Marcel Guinand.

Les anciens Adelphiens se montrent enthousiastes; leurs lettres d’approbation se succèdent.

Le 24 septembre 1919 a lieu la première séance, au local, salle du N° 21 de la rue des Eaux-Vives. Les « nouveaux fondateurs », si l’on peut dire, sont tous présents. Leurs noms sont (par ordre alphabéti­que) :

Paul Collart, Paul Geneux (président), Robert Godel, André Gui­nand, Germain Pochon, Jean Seitz, Alexis Veinie, Richard Walter.

Une vingtaine d’anciens sont également présents.

Nous avons ce soir l’honneur et la chance d’avoir parmi nous Me Marcel Guinand, membre d’honneur. Cher maître, nous vous devons, ainsi qu’à Madame Guinand, la résurrection de l’Adelphia. C’est-à-dire que nous vous devons de belles satisfactions artistiques et de belles amitiés, de beaux souvenirs du temps où nous étions adel­phiens. C’est grâce à vous que nous sommes réunis ici ce soir.

Nous vous adressons, à vous et à la mémoire de votre épouse, l’expression de toute notre reconnaissance et de notre affection. Je propose à l’assemblée de témoigner par ses applaudissements.

La nouvelle Adelphia tient ses séances le mercredi, souvent ac­compagnée par des Anciens. Maint travail écrit est âprement discuté, passionnément défendu. D’autres sont appréciés et mis aux archives. A chaque séance, il y a de la musique, même des compo­sitions musi­cales. On reçoit de nouveaux membres. Dans les seconds actes, on voit reparaître de joyeux écrits qui sont parfois versés à la « Marmite ».

Le 12 mars 1921, Jean Marteau, que nous fêtons ce soir, est reçu à l’Adelphia. Bien qu’il fût, à cette époque thuriféraire d’Anatole France, il présente un travail de candidature sur « Maurin des Mau­res » et « L’illustre Maurin », romans de Jean Aicard. Marteau, écrit le secrétaire, conclut « en ajoutant que Maurin des Maures est une oeuvre profonde, beaucoup plus profonde que d’autres oeuvres contemporaines ».

Les critiques déclarent le style « très correct ». Marteau est reçu à l’unanimité.

Les Adelphiens jouent souvent la comédie, particulièrement à l’Escalade, en présence des Anciens. On joue « Le droit aux Etrennes » de Courteline; « Le cultivateur de Chicago », une revue de Jean Seitz; « Télémaque »; « Le mariage de Messire Corbaz de Jussy », de Jean Marteau, cette dernière pièce jouée en costumes Louis XIV; toutes représentations qui n’engendrent point la mélancolie.

Un ancien Adelphien, ingénieur, professeur au Technicum, M. J.-E. Goss, fonde un prix littéraire pour les Adelphiens actifs, à la mé­moire de son fils Robert, mort adolescent. Chaque année, le prix Robert Goss, d’un montant de Fr.100.- sera attribué par un jury de 3 anciens Adelphiens au meilleur travail personnel présenté par les jeunes. Le travail ne devra être ni historique, ni scientifique, être inédit, ne pas excéder 40 pages; il pourra en particulier être une nouvelle, une pièce de théâtre, ou un recueil de poèmes. Désormais, à chaque printemps, des travaux sont présentés au concours, et parfois le fondateur du prix en augmente le montant. Le fonds qui alimente ce prix disparaîtra, hélas, quelques années plus tard, dans la faillite de la banque de Genève. La Société des Vieux-Adelphiens continue cependant de le décerner, mais il n’y a pas toujours de candidats.

En 1926, l’Adelphia et les Vieux-Adelphiens organisent un pre­mier bal. Grâce à une heureuse confusion sur le nom de Charles Bally, ils obtiennent la salle du Club International, alors dans tout l’éclat de son mobilier Louis XVI et de ses belles colonnes. Le bal, par invitations privées (R.S.V.P.) est un succès. Dans un salon voisin, l’Adelphia offre un vin d’honneur à toutes les sociétés d’étudiants, et le recteur, ancien Adelphien, prend parole.

Les bals vont désormais avoir lieu chaque année. Signalons celui du Cinquantenaire, à l’occasion duquel André Guinand écrit une ballade, et dont le comité de patronage est formé uniquement d’an­ciens Adelphiens connus. Beau succès du bal, ainsi qu’en témoignent les articles de journaux.

La société voit s’accroître le nombre de ses membres. Ils sont 15, puis 20, et, entre 1930 et 1934, ils sont une trentaine. L’Adelphia est la société la plus nombreuse au Collège, malgré l’exigence maintenue du travail de candidature, exigence unique parmi les sociétés analo­gues.

De plus en plus fréquentés, les bals ont lieu à l’Hôtel Métropole, puis à l’hôtel des Bergues. Leur succès financier permet aux Adel­phiens joyeuses excursions et banquets. Leur suite ne sera interrom­pue que par la deuxième guerre mondiale, et reprendra plus tard.

En 1945, en collaboration (très forte) avec les Vieux-Adelphiens, la société donne, le 7 avril, à la salle des Abeilles de l’Athénée, un après-midi littéraire et musical consacré à Philippe Monnier. Au programme figurent : Une conférence de Jean Marteau, « Philippe Monnier et nous »; des pages poétiques de Monnier dites par Fernand Bercher, membre d’honneur, acteur de talent, professeur au Conser­va­toire. Pierre Wissmer, compositeur bien connu et ancien Adel­phien, a composé, sur les « Rimes d’écolier » écrites par Monnier au Collège, de charmantes mélodies qui sont chantées par Madame Ellen Benoît, cantatrice alors fort appréciée. Madame Philippe Mon­nier assiste à cet après-midi littéraire, dont les journaux de l’époque donnent des comptes-rendus élogieux.

Vous savez que l’Adelphia décerne son Ruban d’Honneur aux an­ciens Adelphiens qui lui ont rendu des services exceptionnels ou qui, par leur carrière, ont honoré l’Adelphia.

A part notre vénéré membre d’honneur, Marcel Guinand, l’Adel­phia qui, au siècle dernier, avait donné le ruban à plusieurs de ses fondateurs, l’a remis, au cours de ce siècle, à Charles Bally, à Henri Fehr, dont j’ai parlé précédemment, à Eugène Duchosal, longtemps président des Vieux-Adelphiens, à André Guinand, qui avait incité le Cénacle à reconstituer l’Adelphia, et qui fut plus tard président du Conseil National; à Pierre Guinand, qui, après avoir présidé l’Adel­phia, l’a toujours suivie avec dévouement; il a été président du Grand Conseil où il est toujours député; c’est un talentueux pastelliste; il a fait au printemps dernier une très belle exposition. Le ruban d’hon­neur a aussi été remis à Henri Aillaud, ancien président très actif de l’Adelphia, devenu ambassadeur d’Italie à Prague, puis à Varsovie, actuellement Secrétaire général de l’Institut Italo-Latino-Américain à Rome; sa présence ici ce soir nous prouve sa fidélité. L’année der­nière, la société décernait le ruban à Pierre Wissmer, compositeur de talent, qui a obtenu le grand prix de composition de la Ville de Paris. L’Adelphia a aussi donné le ruban à votre serviteur. Elle le décerne ce soir, bien tardivement, il est vrai, à notre ami Jean Marteau, écrivain et journaliste bien connu, en reconnaissance pour sa belle carrière de romancier et les sentiments qu’il a gardés pour notre ancienne so­ciété, dont il a autrefois été le malicieux secrétaire, puis le président. Nous laissons au porte-parole de l’Adelphia le soin de lui exprimer toute notre admiration pour son oeuvre et toute notre amitié.

Terminons en citant un écrit que j’ai trouvé dans les Archives et qui n’est malheureusement pas signé :

Les amateurs qui ont dédié leurs études au même artiste se jalou­sent, les savants qui ont consacré leur vie à la même matière se détestent cordialement, les hommes qui ont aimé la même femme ne s’en trouvent pas plus liés; mais ceux qui ont aimé l’Adelphia au temps de leur jeunesse ne cessent de retrouver entre eux, comme un signe de ralliement, ce commun intérêt qui les rapproche et crée souvent de nouvelles amitiés, imprévues, je crois, des fondateurs mêmes de l’Adelphia, et que ce mot magique a suscitées.

SPICHER Président des V.-A. 1968

Complément à l’« esquisse historique »

A l’heure où André Spicher parle, l’Adelphia est moribonde. Comme bien d’autres sociétés, elle voit le nombre de ses mem­bres brutalement réduit par les idées en vogue. A la fin des années 1960, l’Adelphia s’éteint, et son matériel est récupéré et conservé chez les Vieux-Adelphiens. Ces derniers continuent à se voir chaque mois dans les salons de l’hôtel Touring-Balance, place Longemalle, et perpétuent les usages adelphiens par des conférences.

Pendant toutes les années qui suivront, ce sera à André Spicher que les Vieux-Adelphiens devront de rester en contact. Et c’est aussi à son épouse, Gilberte Spicher, que la société peut être reconnaissante pour son travail assidu et constant, pour les convocations et l’organi­sation des rencontres.

Quatorze années vont ainsi s’écouler, et l’espoir de voir renaître l’Adelphia s’amenuise. Et soudain, à l’automne 1984, trois collégiens décident à nouveau de faire revivre les couleurs de l’Adelphia, grâce à une petite annonce déposée par André Spicher sur un tableau du Collège ! Il s’agit de :

Patrick Susz Jean-François de Saussure Thierry Bounous.

L’enthousiasme est général. Les Vieux-Adelphiens se concertent, chacun est profondément heureux. Ils sont reçus le 5 octobre 1984 à l’hôtel Touring-Balance et le président des V.-A. André Spicher leur remet le ruban noir-rouge-noir. Patrick Susz est le premier président de la nouvelle Adelphia. Il est aussi conseiller municipal à Vandoeu­vres (il a 19 ans) ce qui fait de lui, probablement, le plus jeune con­seiller municipal de Suisse.

Plusieurs modifications seront apportées aux statuts : tout d’abord, la société devient mixte (on annonce déjà la candidature de deux jeunes filles : Nancy Johnson et Rachel Nessim). Dès lors, l’élément féminin ne cessera d’agrémenter la vie adelphienne, par sa sensibi­lité, son bon sens et… son charme.

La société acceptera désormais non seulement des collégiens mais aussi des étudiants de l’Université. C’est d’ailleurs devenu une véri­table vocation de l’Adelphia que d’assurer un pont entre les deux niveaux d’étude.

Mais il faut ajouter que la première importance reste aux travaux écrits et aux conférences. L’art et la littérature restent le pôle des activités adelphiennes.

A l’Escalade 1984, la refondation de l’Adelphia est solennellement célébrée lors du banquet avec les Vieux-Adelphiens.

Les Adelphiens se réunissent chez l’un ou l’autre des membres. L’ambiance est bouillonnante, malgré la difficulté qu’on éprouve à dénicher un local.

Et c’est le samedi 8 juin 1985 qu’a lieu le grand bal de Renaissance de l’Adelphia, dans les salons de l’hôtel Métropole. A cette occasion, un des Vieux-Adelphiens, François-Achille Roch, expliquera que fina­lement, les plus surpris de tous sont les Vieux-Adelphiens, étonnés d’apprendre que l’ère des Jeans n’a pas supprimé le goût pour les fêtes élégantes.

L’année d’après, en 1986, c’est au Hilton qu’aura lieu le grand bal. Puis la société reçoit son local de la rue Necker, devenu cher à tous ceux qui ont connu et marqué cette période. L’inauguration a lieu le 1er décembre, avec les représentants de toutes les autres sociétés. L’on se retrouvera ainsi en plein centre-ville, dans un espace agréa­ble. Le Dr Marcel Neyroud, Pierre Comte et André Thomann financeront le premier mobilier, soit une splendide table Louis XIII et douze chaises.

L’Adelphia ne manque pas d’esprit d’initiative. En 1987, sous l’im­pulsion de Philippe Eberhard, elle soumet aux autorités une pétition pour le retour de l’éducation civique dans les écoles. Ce document, fort de 1691 signatures, sera à l’origine d’une plaquette soumise au Conseil d’Etat, et, finalement, à la réintroduction de cette préoccupa­tion dans les milieux enseignants. La même année, elle donne à nou­veau son bal au Hilton (14 mars) puis organise pour la première fois son désormais traditionnel vin chaud de l’escalade.

Parallèlement aux bals ont lieu les Adelphiades, rallyes auxquels participent de nombreux étudiants. L’on fait des soirées et des Week-ends comme celui organisé par le président d’alors, Frédéric Da­wance, à Samoëns, ou plus tard, certaine soirée non moins inou­bliable à Lucin­ges, chez Philippe Eberhard.

En 1988, c’est le bal du Salève. A cette occasion, l’Adelphia a loué le téléphérique et chacun se rend ainsi au sommet, où a lieu cette soirée mémorable sous chapiteau dont on voit les feux depuis Genève. Ce bal est un très grand succès, avec plus de 1000 participants et un très joli bénéfice grâce aux innombrables publicités du carnet de bal. Un terrible orage l’après-midi même et une coupure générale d’électricité ont fait craindre le pire. Mais à 19h00 la lumière fut, et parents et amis se retrouvèrent pour un dîner de « famille ». En pleine campagne de prévention pour le SIDA, Adelphia osa joindre à chaque programme un préservatif. Ainsi qu’un petit lingot d’or en chocolat pour la bonne bouche ! Soirée paillettes et étincelante, à l’image de ce que peut-être une soirée « James Bond » : grâce, beauté, longues robes, nœuds papillon !

La même année, la société reçoit son panneau d’affichage à l’Université, jusqu’alors tenu par Belles-Lettres moribonde.

Les années qui suivront verront l’organisation de soirées plus peti­tes, des bals « privés » et uniquement sur invitation qui ont lieu à la Société Littéraire, dans des salons feutrés et élégants.

En 1989, le prix littéraire Adelphia-Robert Saas est lancé et attri­bué à une jeune collégienne.

Les Adelphiens voyagent : Florence, Paris, Rome, Amsterdam, Prague, laisseront à certains des souvenirs… impérissables ! Les banquets avec les Vieux-Adelphiens ont toujours lieu régulièrement, d’abord au Centre Universitaire, puis à la Société Littéraire. C’est toujours un moment d’agrément, et les jeunes Adelphiens y jouent de la musique classique, y disent des poèmes.

Entre temps, les Jeunes V.-A. se rencontrent fréquemment pour dî­ner et retrouver les jeunes à leur local.

Enfin, c’est en 1992 que la tradition des grands bals réapparaît avec une magnifique soirée organisée à l’hôtel Beau-Rivage sous une pluie de roses rouges, remises ensuite au départ de chaque participante.

Elle n’oublie pas de décerner des rubans d’honneur. Sont succes­sivement ainsi décorés Philippe Eberhard pour son dévouement, puis, à titre posthume, Madame Gilberte Spicher, qui a pendant plusieurs décennies secondé son mari pour l’organisation des soirées adel­phiennes. Souhaitons que son souvenir reste longtemps présent à la mé­moire des Adelphiens.

Aujourd’hui, l’Adelphia, après avoir perdu son local de la rue Necker et erré quelques temps chez les uns et les autres, a retrouvé un lieu de rencontres dans une pièce de l’ancienne Société des Instruments de Physique, à Plainpalais. Elle compte environ quinze membres, ce qui porte à plus de soixante le nombre de membres ayant été admis à l’Adelphia depuis sa refondation. L’attachement à l’Adelphia se transmet entre frères et soeurs ou entre cousins. Ainsi, les familles Dawance, Fatio et de Saussure auront compté plusieurs Adelphiens.

Certains membres publient, comme le physicien Robert Betchov, ancien chercheur au Pentagone, qui signe une importante réflexion sur l’état monde, ou le professeur G. Mentha qui continue ses travaux d’économie, ou encore votre serviteur qui connaît le bonheur d’une première publication poétique « Maritimes ». Mais il n’y a pas que les livres. Il y a la musique, où s’illustrent brillamment Emmanuelle de Saussure, Jacqueline Camoletti, et dans un autre genre, Dan Edelstein, prési­dent de l’Adelphia à l’heure où j’écris.

Il n’est pas possible de décrire tous les souvenirs que l’Adelphia a pu nous procurer. Je revois les images de nos fous rires avec Cyrille Gay et Thierry Bounous, des empoignades politiques entre Frédéric Binder et Philippe Eberhard, l’apéritif dans le salon des Schacci, à Rome, où nous étions reçus par S.E. Henri Aillaud, les folles messes de minuit, les thunes plus audacieuses les unes que les autres comme celle de ce kidnapping factice au McDonald’s de Rive qui aurait pu très mal tourner ce 13 décembre 1987. Sans parler des conférences qui nous ont tant appris, et dans combien de domaines différents : littérature, peinture, mais aussi histoire, géo­graphie, ethnologie, sciences, politique…

Mais la société nous a aussi appris à nous respecter, à nous apprécier d’une amitié fidèle, à nous ouvrir aux autres, à apprendre sou­dain qu’il y a plus fort que soi. Pour cela, merci à tous ceux qui ont fait l’Adelphia.

A l’aube du dixième anniversaire de sa refondation, souhaitons-lui longue vie. Qu’elle soit toujours animée par l’esprit de concorde, qui, selon notre devise, fait croître les petites choses; et que, toujours, ses membres « fassent des chansons dignes de notre beau nom : l’Adelphia ».

Vivat, Crescat, Floreat Adelphia Genevensis Ad Aeternum,

(Janvier 1994)

Louis de SAUSSURE, Président 1989 Secrétaire des V.-A.

Alors rejoignez-nous !

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